3 avril 2009
Photographes, journalistes et blogueurs interpellés par les militaires (28/03)
La crise politique actuelle est si inhabituelle et sort tant des schémas classiques que les blogueurs et utilisateurs de Twitter s’efforcent d’en assurer le suivi.
Les informations relatives à la crise malgache ont abondé sur Internet, attirant l’attention internationale. Lova Rakotomalala, a fait l’objet d’un article du Wall Street Journal et d’une interview sur CNN pour le dévouement avec lequel il a relayé et traduit en anglais les messages envoyés par les utilisateurs de Twitter. Un autre blogueur, Solofo Rafeno, a été invité à participer à un débat sur France 24.
De récents et inquiétants développements pourraient entraver à l’avenir la transmission d’informations par les utilisateurs de Twitter et les blogueurs malgaches. Le site Globalvoice a relaté les menaces dont sont victimes les blogueurs et les utilisateurs malgaches de Twitter ces derniers jours.
L’un d’eux, Thierry_ratsiz a été arrêté et obligé d’effacer ses photos numériques par les forces de sécurité.
thierry_ratsiz: #madagascar Ils m’ont juste prié de ne pas prendre photos (d’eux!!) et effacer photos, peur de photos diffuses sur internet!!
thierry_ratsiz: hola, interpelé par les gendarmes pour avoir été surpris en prenant des photos… :/ #madagascar
Les blogueurs et utilisateurs de Twitter R1lita et Pakysse racontent avoir vécu la même expérience :
TRT @r1lita : @pakysse, un autre utilisateur de Twitter malgache a également été forcé par la police de supprimer les photos qu’il avait prises plus tôt à Antaninarenina.
“Un régime obsédé par la com(munication)”
Mais l’incident le plus effrayant a été raconté par Avylavitra, un des blogueurs ayant le plus écrit sur la crise.
Ce qui s’est passé est d’autant plus étonnant que c’était inattendu. Un des soldats du RM1 [note de l’auteur : il s’agit du nom d’une caserne], qui patrouillait dans la rue, a pointé son arme vers MOI et dit :
“Que les journalistes s’en aillent. Nous n’avons pas besoin de journalistes ici. Partez ou je tire !”
Je ne savais pas quoi faire alors je lui ai juste montré la carte que je portais autour du cou. Je conduisais à ce moment là un scooter alors que la plupart des journalistes et photographes étaient à pied. Quand il a vu qu’au lieu de bouger je montrais ma carte, il est encore monté d’un ton. Je ne sais pas s’il était responsable de la caserne ni qui il était. Mais tout le monde a pu voir ce qu’il faisait.
Quelques journalistes ont osé lui demander :
“Depuis quand les journalistes ne peuvent-ils plus prendre de photos et faire leur travail ? Est-ce que la loi a changé ?”
Il a répondu en pointant son arme vers ma tête. Nous n’étions séparés que par la largeur du trottoir. Il a répété :
“J’ai dit que je n’avais pas besoin de journalistes ici, alors allez-vous en ou je vais tirer. Je vais vous abattre !”
Ce fut un moment aigre-doux pour moi, mes amis. Mais je n’en ai pas la trace sur film, car j’ai juste fait demi-tour et me suis éloigné avec les autres journalistes et photographes. Donc, je vous demande, à ceux qui auraient pu filmer la scène, de m’envoyer au moins le lien grâce auquel je pourrais la visionner. J’espère que la mise en ligne de ce billet servira de leçon à ces soldats, car tout le monde va connaître la vérité et ce qui s’est passé. C’est ce que je m’efforce de faire sur le blog GazetyAdaladala.
Enfin un journaliste nous a déclarés sous couvert d’anonymat:
C’est un régime obsédé par la com. Regardez comment ils traitent les journalistes. Pour vous dire certains journalistes étrangers m’ont même dit que les nouveaux dirigeants sont des vrais pros de la com et qu’ils essayent par des invitations et autres de s’attirer la sympathie des étrangers.