Témoignage poignant d’un travailleur social sur les réalités à la campagne

1 février 2009

Je suis un travailleur social et donc assujettie à un droit de réserve et de neutralité. Ce qui est dit sur « l’amertume et les humiliations » du peuple me laisse quelque peu dubitative. Je suis les trois quart du temps sur le terrain, en brousse dans les coins les plus reculés de Madagascar. Il m’arrive de marcher des jours durant, de traverser des rivières à guet pour pouvoir joindre des hameaux isolés et enclavés. A ce titre, je peux témoigner de la pauvreté qui existe dans notre pays, des difficultés auxquelles la population fait face au quotidien. Il y a des situations poignantes où la population n’est même pas consciente de ses droits basiques. Toutefois, de l’avis des personnes interrogées, qui n’ont pas d’autres moyens de s’exprimer et de faire entendre leur voix, il y a un changement dans leur vie. L’accès géographique aux services sociaux s’améliore, les écoles et centres de santé se rapprochent d’eux, il y a de nouveaux puits et ils peuvent donc avoir de l’eau potable. Les nouvelles routes leur permettent de faire sortir leurs produits les mettant à l’abri des collecteurs véreux. Certes cela ne couvre pas encore tout le pays mais au moins il y a un commencement ! Et je suis convaincue que c’est cette population qui est la base du développement. C’est donc au nom  de cette population longtemps oubliée par les régimes qui se sont succédé et qui a maintenant une lueur d’espoir que je réagis ici. Aujourd’hui elle est une fois de plus ignorée par ceux qui se targuent d’être la voix du peuple et qui ignorent pourtant ce qui se passe vraiment dans le pays !

Je voudrais également attirer l’attention de tous sur le fait que la crise alimentaire mondiale de 2008, et qui va probablement encore continuer cette année, n’a pas touché Madagascar, et ce malgré la pauvreté des gens. Des enquêtes nutritionnelles menées dans les grands centres urbains et dans les zones fortement touchées par les cyclones montrent que Madagascar n’a pas eu d’urgences nutritionnelles jusqu’à la fin de l’année 2008. Ceci parce que le gouvernement a su gérer le stock de riz dans le pays. Sommes nous conscients que sans cette gestion la situation aurait été catastrophique, non seulement pour ces populations vulnérables mais aussi pour nous tous !

N’ayant pas les compétences pour donner un avis sur l’économie, je me suis contenté de ne parler que du développement social que je vis au quotidien. Le développement social est en cours et il serait criminel de l’arrêter en si bon chemin !

Je déplore que nous, citadins et intellectuels de tous bords, ne regardions que ce qui nous concerne et que nous ne voyons pas plus loin que notre petit microcosme. Je pense et espère que tous les appels qui sont lancés actuellement sont animés par un sentiment patriotique et citoyen mais, s’il vous plaît, faisons le de manière éclairée. Efforçons nous à connaître la réalité dans notre pays avant de décider du sort des 85% de Malagasy restants !